MONNAIE
Quand on se plonge dans les archives de l’Ancien Régime, l’exotisme est de mise pour les poids et mesures mais aussi pour le système monétaire tout aussi complexe. Essayons de simplifier l’inextricable maquis des pièces de monnaies : une trentaine en circulation dans le royaume au début du XVIIIe.
D’abord, il faut distinguer la « monnaie de compte » et la monnaie d’usage (les pièces). La première est « abstraite » et sert de référence pour compter. Elle comporte trois unités, la livre, le sol (sous) et le denier. Une livre vaut 20 sols, le sol vaut 12 deniers donc une livre est l’équivalent de 240 deniers.
Depuis la fin du XIIIe, la monarchie contrôle la frappe et pour payer l’on utilise des pièces d’or ou d’argent (on parle de bimétallisme) mais aussi pour les petites sommes de billon (alliage de cuivre et d’un peu d’argent). Au fil du temps nombre et variétés de pièces se multiplient d’autant plus que les monnaies étrangères circulent sur le territoire. Ainsi, au début du XVIIe la pistole espagnole concurrence l’écu d’or et la piastre (espagnole aussi) le denier d’argent. Pour maîtriser ce système compliqué, la monarchie frappe, en 1639 et 1641, deux nouvelles pièces : les louis d’or et d’argent mais elles mettent du temps à s’imposer et en outre, la royauté effectue de multiples manipulations monétaires surtout sous Louis XIV (43 entre 1689 et 1715) qui contribuent à l’instabilité du système.
En 1726 une refonte générale va le stabiliser pratiquement jusqu’à la Révolution. Le louis d’or vaut 24 livres (48 pour le double louis et 12 pour le demi) ; l’écu d’argent a pour base 6 livres et est décliné en ½ écu, cinquième (1 livre 4 sols), dixième (12 sols), vingtième (6 sols) ; pour ce que les notaires désignent comme la monnaie courante on a deux pièces de billon, le sol (2 sols !) et le demi sol et des pièces de cuivre comme le gros sou qui lui vaut un sol …
D’après
- Jérôme Blanc, « La complexité monétaire en France sous l’Ancien régime : étendue et modes de gestion. » De Pecunia, 1994, VI (3), pp.81-111. En ligne sur halshs.archives- ouvertes.fr
- Michel Figeac (s.d), « L’ancienne France au quotidien », Armand Colin, 2014.
POIDS et MESURES
Mesurer ne représentait pas pour les paysans locaux, du moins ceux qui savaient compter, une difficulté majeure : ils connaissaient leur système local. Pour les historiens, c’est une autre affaire car les unités de mesure sont, à l’échelle du royaume, d’une extraordinaire variété. Une même mesure peut avoir des valeurs différentes d’une paroisse à l’autre et dans une région on peut utiliser des unités différentes. En clair et pour faire une comparaison avec notre système métrique, c’est comme si un mètre mesurait 95 cm à Mirandol et 102 à Montirat et qu’à Jouqueviel, l’on utilise le yard de 91 cm …
Pour convertir les anciennes mesures dans notre système décimal, des tables de conversion ont été élaborées, elles sont utiles dans la mesure où l’on connaît exactement l’unité employée localement, ce qui n’est pas toujours le cas. Pour nos documents transcrits, nous avons donné les équivalences des mesures dans les notes de bas de page.
Ci-dessous les plus courantes pour la France avec leur valeur de conversion moyenne.
Distance :
La célèbre lieue pour les distances routières : 4,4 km. La toise 1,90 m divisée en 6 pieds (32 cm) est l’équivalent pour notre région de la canne (le Ségala utilise celle de Montpellier 1, 987 m) et du pan (25 cm car 8 pans dans une canne et pas 6 …). Plus petit le pouce (2,7 cm).
Superficie :
L’arpent est le plus commun (1/2 ha en moyenne pour la cinquantaine de variétés de cette mesure …) sauf dans le sud où règne comme dans nos communautés, la sétérée, surface ensemencée en théorie par un setier de grains (1/4 à 1/2 ha comme c’est le cas à Jouqueviel) divisée en 8 mesures (6 ares 30 ca) et 4 boisseaux (1 are 60 ca).
Volumes :
Mesure utilisée pour les grains que l’on ne pèse pas comme on le fait actuellement : le setier. Il varie selon les endroits et les produits (celui de l’avoine est double de celui du blé) et équivaut pour le blé à environ 90 kg ; il est divisé en 12 boisseaux. C’est aussi le nom du récipient qui sert à la mesure que l’on peut faire « rase ou comble » ce qui bien sûr modifie le volume mesuré …
Pour les liquides (sauf l’huile …) c’est la pinte qui est l’unité de base (0,9 litre à Paris) et le muid (288 pintes) ou la pipe (un muid et demi) pour le gros commerce.
Poids :
La livre est à la base du système, elle varie de 300 à 600 grammes. Divisée en deux marcs (environ 250 g) et 16 onces.
Référence pour le Tarn
- Charles Portal, « Les anciennes mesures agraires du Tarn », Annuaire du Tarn, 1913.
Chronologie
Le plus simple est d’abord le rappel classique des dates de règnes de"nos bons rois" :
Henri IV 1589-1610,
Louis XIII 1610-1643,
Louis XIV 1643-1715,
Louis XV 1715-1774,
Louis XVI 1774-1792.
Pendant leur minorité Louis XIII et Louis XIV n’ont pas exercé le pouvoir et ce sont leur mère qui furent régentes (Marie de Médicis 1610-1614, Anne d’Autriche 1643-1651 déstabilisée par la Fronde de 1648 à 1653). Pendant celle de Louis XV, c’est son oncle le duc d’Orléans qui gouverne de 1715 à 1723 (période nommée la Régence). On pourrait aussi citer Richelieu 1624-1642, Mazarin 1642-1651 et Colbert 1665-1683, trois ministres ayant marqué leur période.
L’histoire rurale est moins connue, voici quelques repères sur des thèmes que nous traiterons à l’échelle locale de nos trois communautés.
Les révoltes paysannes (quelques unes) :
les Croquants 1624-27 (Quercy) 1643 (Rouergue), les Nu-Pieds de Normandie (1639), les Bonnets Rouges en Bretagne (1675), les Tard-Avisés du Quercy (1707) et plus larges les émeutes frumentaires de la guerre des Farines (1775) dans le Bassin Parisien.
Les périodes de crise hélas nombreuses :
1625-1632 famines et « pestes », idem entre 1649 et 1652 dans le Bassin Parisien et en Guyenne, 1660-62 crise dite de l’Avènement (ne touche pas le Midi), 1693-94 famines et crise majeure, 1709 le « grand hiver », 1720 peste (Provence/Languedoc), 1740-42 crise démographique, 1788-89 crise frumentaire et grand hiver.
Les impôts :
1695 la capitation premier impôt touchant tous les ménages (sauf les clercs), 1710, le « dixième" qui touche toutes les propriétés et qui devient en 1749 le vingtième.
Les cultures :
Fin du XVIe siècle la pomme de terre et le haricot sont mentionnés pour la première fois en France ; le maïs est coté à Castelnaudary en 1637 et la pomme de terre en 1694 ; mise au point du champagne (Don Pérignon 1670) ; les grands crus de Bordeaux vendus aux enchères (1704).
Les guerres :
Le XVIIe en est rempli avec la guerre de Trente Ans (1618-1648), de Dévolution (1667-1668), de Hollande (1672-1678), de la Ligue d’Augsbourg (1688-1697), de Succession d’Espagne (1701-1713) … et le XVIIIe ne fait guère mieux notamment avec la guerre de Sept Ans (1756-1763).